Musique bruitiste, électro embryonnaire, new wave décalée y germaient à l’envi. Des Abwärts à Xmal Deutschland, en passant par Einstürzende Neubauten ou Mona Mur, le récit fragmenté de centaines d’interviews réalisées durant quatre ans. Kaléidoscopique.
Jean-Pierre Simard – Rolling Stone
Revue de presse
Pour les trente ans de la chute du Mur de Berlin, La Première – RTBF a convié Frédéric Cisnal pour l’émission Le Mug. Ils ont abordé son livre Berlin avant la techno et la vie à Berlin avant la chute.
Écouter l’émission sur le site de la RTBF
Florian Delorme reçoit Frédéric Cisnal pour parler de la contre-culture à Berlin.
De la musique de l’underground berlinois à celle des boîtes gays aux Etats-Unis, les contre-culture ont parfois joué un rôle primordial dans l’identité de certains lieux. Mais peut-on encore aujourd’hui parler de contre-cultures lorsqu’elles se popularisent ? Et avec quels effets sur ces lieux ?
Le Trésor : un club mythique installé à l’intérieur du coffre d‘un ancien grand magasin. Inauguré en 1991, il a accueilli les plus grands DJ de la scène allemande et internationale. Un véritable no man’s land avant de renaître sous une forme inattendue : cet espace de fête, créé par Dimitri Hegermann et devenu l’un des piliers de la mythique nuit berlinoise rythmée par la musique Techno. Musique qui s’est ensuite rapidement diffusée, franchissant le mur et attirant des amateurs du monde entier, et qui, aujourd’hui, ne constitue plus vraiment une contre-culture tant elle est écoutée et tant elle représente une industrie de masse.
Berlin : LA capitale européenne de la contre-culture. Une ville qui, à la fin du 20ème siècle s’est réinventée après avoir subi la destruction de la Seconde Guerre Mondiale, mais aussi la torpeur de la Guerre Froide lorsque, à l’ombre du mur, tout semblait figé. C’est dans cet environnement en apparence immobile que, pourtant, dans les années 1980, quelque chose se passait : une scène artistique novatrice, inventive, provocatrice, en rupture avec le passé, et désireuse d’inventer l’avenir.
Mais de quoi était faite cette scène alternative berlinoise ? Qui étaient les acteurs de cette histoire de la contre-culture musicale qui nous éclaire sur la grande Histoire de cette ville qui s’est réinventée une identité depuis ses marges ? Et que reste-il, aujourd’hui, de cette contre-culture produite sur la scène berlinoise des années 1980 ? Comment la chute du mur de Berlin l’a-t-elle transformée ?
Nous irons aux USA où, récemment, la culture des clubs s’est trouvée brutalement sous pression, avec l’épisode de la tuerie du Pulse à Orlando il y a un peu plus d’une semaine. Un club gay, dans un quartier essentiellement latino, et dans une Amérique toujours sujette à un climat homophobe latent. Là aussi la production musicale s’est faite de manière presque cachée, confidentielle et reste encore largement Underground.
Pression sociale, pression parfois explicitement politique, et émergence d’une timide contre culture pas forcément là où on l’attend : nous ferons un pas de côté au Royaume du Bhoutan en fin d’émission. Royaume qui a fait du Bonheur un indicateur national qui a remplacé le PIB classique et a mis en place une politique volontariste en la matière. Comment alors comprendre l’émergence en ce moment d’un art du tatouage pourtant officiellement prohibé par les autorités ?
Écouter l’émission sur le site de France Culture
Sous titré « du post-punk à la chute du mur », Berlin avant la techno raconte le milieu alternatif et underground de la musique rock allemande entre 1977 et 1989 à Berlin-Ouest. Parmi les activistes de ses cultures émergentes (groupes musicaux, acteurs, performeurs, graffeurs, créateurs de labels (Zick Zack, Rip Off, Zensor, Monogram), de boutiques de disques (SO 36, Eisengrau), de vêtements …), on trouve les membres d’Einstürzende Neubauten, Di Haut, Sprung Aus Den Wolken, Liaisons Dangereuses, O.U.T., Xmal Deutschland, Malaria !, Mania D, Matador, avec en toile de fond, les passages en ville d’Iggy Pop, David Bowie (sa trilogie Berlinoise et son apparition dans le film Moi, Christiane F. 13 ans, droguée, prostituée…), Lydia Lunch et les premiers pas de Nick Cave (avec The Birthday Party), Depeche mode, Fad Gadget et aussi Wim Wenders et son magnifique film Les ailes du désir (sorti en 1987).
Les chapitres ne sont construits exclusivement qu’avec les témoignages. Pas de rédactions de l’auteur (sauf un avant-propos), n’y d’historique, juste les témoignages. Si le style peut être casse gueule (voir le livre très dur à digérer, Pas de beauté sans danger consacré à Einstürzende Neubauten édité chez Camion Blanc), ici c’est une réussite. L’auteur et journaliste Frédéric Cisnal, connait bien Berlin pour y avoir vécu 16 ans (de 1974 à 1990). Le choix des activistes est pertinent, les interviews sont complètes et précises (il lui a fallu 4 ans pour les faires) et la mise en forme de cette somme de réponses est dans la lecture très fluide. Ainsi le lecteur entre facilement du coté back stage, du coté créatif des acteurs et surtout il pénètre dans le point de départ, dans l’émergence de ces talents. Blixa Bargeld (Neubauten) travaille dans une boutique, Alexander Hacke (Neubauten) n’a que 14 ans et est déjà bien actif, Christoph Dreher (Die Haut) loge les Birthday Party dans son loft, Mania D enregistre dans le studio de Christopher Franke de Tangerine Dream, Elisabeth Recker crée le label Monogram Records pour sortir les disques de ces potes. A travers les interviews, on apprend une multitude de choses sur la vie à Berlin (des sorties en clubs à la vie quotidienne), sur le début des groupes, sur la façon de vivre et de se débrouiller pour s’en sortir. C’est quelque part une leçon de liberté de créer en zone urbaine. On sent à la lecture des propos, le bouillonnement créatif dans l’ambiance grise de Berlin Ouest, avec son mur « cicatrice » (il faut plus d’une heure pour passer la « douane »), les bâtiments qui gardent encore des traces de la seconde guerre mondiale, les lofts non chauffés aux prix dérisoires. Le tout avec un brassage de jeunes marginaux d’Europe qui viennent vivre à Berlin pour ne pas faire le service militaire. Berlin est à l’Europe ce que New-York est aux Etats-Unis, à savoir une ville en friche en pleine reconstruction. A Berlin il y a la scène industrielle, à NYC il y a la scène no-wave, soit 2 façons de repartir à zéro avec le rock. Bizarrement Berlin sera moins proche de la scène punk de Londres.
Au risque de se répéter, la force de ce livre est de nous plonger dans le Berlin des années 80’s sans tomber dans la nostalgie du « c’était mieux avant » et sans lire un énième texte sans saveur (car trop généraliste) sur la scène post punk/new wave. Enfin, en belle conclusion, le dernier chapitre relate ce que faisaient les artistes le 9 novembre 1989, jour de la chute du mur. Bref bravo à l’auteur Frédéric Cisnal pour ce livre qu’on ne refilera pas à Christiane F (également ex petite amie d’Alexander Hacke) pour qu’elle ne le vende pas pour s’acheter sa dose de came, mais qu’on vous recommande d’acheter pour le lire, si vous ne l’avez pas encore fait vu qu’il est sorti en août 2015.
Comme le chante Guerre Froide sur son titre Demain Berlin, « Nous nous rencontrerons dans les ruines de Berlin (…) La mort semble parfois un bien », les ruines c’étaient en 1981, en 2016 place au Kreuzberg Boboland avec quelques punks à chiens égarés entre les boutiques bio. Serions nous nostalgique des ruines?
Retrouvez cette chronique sur le site foutraque.com
Cet ouvrage d’un Strasbourgeois né en 1969 revient sur la scène musicale berlinoise des années 1980. Il touchera particulièrement ceux qui aiment Berlin et le côté alternatif de cette ville. Construit autour groupes et à partir d’extraits d’interviews d’acteurs du milieu créatif, ce livre ne manque vraiment pas de rythme. Il permet à merveille de ressentir l’ambiance de l’époque. À ce livre extrêmement intéressant, il ne manque qu’une bande-son changeant à chaque page…
En fin d’ouvrage, une discographie succincte, mais essentielle, permet toutefois au lecteur de faire le nécessaire ! Pour compléter l’expérience, il pourrait être bon de voir, dans la foulée, le film documentaire B-movie qui traite du même sujet. Et puis de faire un voyage à Berlin, évidemment…
Berlin avant la techno
Avec un sous-titre très précis : Du post-punk à la chute du mur. Et en illustration de couverture une photo de ce fameux mur… Entre nous, un autre choix de photo – celles montrant le mur tagué – associé avec celle que l’on voit aurait peut-être tiré l’œil et donné envie.
L’auteur nous dit qu’il lui a fallu quatre années pour rencontrer et faire parler tous les individus – des deux sexes – qui ont participé à la création de la musique berlinoise d’avant 1989. Je pense que ce livre trouvera seul ses lecteurs mais tant qu’à nous donner une version française des rencontres et interviews – on ne doutera pas du succès d’une version allemande – il aurait pu aussi nous offrir une traduction des noms de groupe (tous ne sont pas traduits) et des reproductions de flyers et de tags qui illustrent l’intérieur.
Difficile de remettre en cause l’histoire et les histoires racontées ici. En revanche, on peut s’interroger sur deux choses. D’abord le fait que manifestement les personnes qui se racontent et parlent de leur expérience musicale ne se vantent pas, ils/elles ne montent pas en épingle ce qu’ils/elles ont réalisé. J’insiste sur ils/elles parce que les femmes ont pris une part importante. Ensuite, et c’est sans aucun doute le plus surprenant, peu d’entre eux se sont posés des questions sur leur rôle, leur importance ou non. En fait ils/elles semblent avoir tout simplement vécu…
On aurait aimé aussi une discographie critique ou sélective pour ceux et celles dont l’allemand n’est connu.
Bonne lecture, bonne écoute…
Retrouvez cette chronique sur le site Dayli Books
Folle période inconnue que cet intervalle vers 1979–80 (et après) ou les berlinois – isolés dans une ville à moitié en déshérence -, ont recommencé à créer sous le choc de la vague Punk anglaise. Le livre de Frédéric Cisnal Berlin avant la Techno, tente de reconstituer la scène émergente à Berlin ouest, en faisant parler les acteurs pionniers de ce mouvement qui allait finir en Techno allemande.
[…]
”Retrouvez l’article en intégralité sur le site de Radio Nova”: http://www.novaplanet.com/novamag/49379/berlin-avant-la-techno
Gsuntheim consacre un reportage au livre de Frédéric Cisnal et Hervé interview ce dernier sur les motivations qui l’ont poussé à écrire cet ouvrage.
Visualisez le reportage consacré à Frédéric Cisnal à partir de 20’30
Le Strasbourgeois Frédéric Cisnal est retourné à Berlin afin de recueillir le témoignage des acteurs de la scène musicale underground des eighties. Ils sont rassemblés dans un passionnant ouvrage prenant la forme d’un recueil d’interviews.
Le Berlin des 80’s ? Une ville portant « encore les stigmates de la Seconde Guerre mondiale ». Dans son introduction, Frédéric Cisnal, décrit ainsi la « cité malade » : « Les hivers rigoureux, la pollution engendrée par l’industrie de la République démocratique allemande et le chauffage au lignite rendaient l’atmosphère suffocante. » L’auteur qui, de père militaire habita à Berlin-Ouest de 1974 (il a 4 / 5 ans) à 1990, n’idéalise pas cette époque. Il nous confie : « La vie était dure, c’était triste, très différent d’aujourd’hui. Berlin était une ville emmurée, sous perfusion, avec une jeunesse à l’abandon. »
Dans ce sinistre contexte de Guerre froide, une scène artistique foisonnante s’est développée. De jeunes gens à la marge, fuyant le service militaire, se réunissaient dans des caves, squats, cinés alternatifs ou apparts communautaires pour inventer un nouveau langage, des concepts artistiques novateurs où l’accident n’est pas exclu, afin de « fuir un quotidien morne et de lui donner un sens », écrit-il en préambule d’un livre qui donne la parole aux héros de la période allant de 1977 à la chute du Mur, en 1989.
Durant quatre ans, Frédéric mena une série d’entretiens dans des bars devant une bière, en backstage ou dans le hall d’un hôtel. Un fil conducteur s’est tissé, « une histoire se racontait ». Berlin avant la techno se compose ainsi d’une succession d’interventions : Edgar Domin de Mekanïk Destrüktïw Komandöh, Jochen Arbeit de Sprung aus den Wolken ou Die Haut, Kiddy Citny, peintre du Mur et membre (entre autres) de O.U.T. (qui accompagna Nina Hagen), Wolfgang Müller de Die Tödliche Doris… La figure tutélaire : Einstürzende Neubauten. La statue du commandeur : Blixa Bargeld, leader d’un groupe cherchant à briser les conventions, jour et nuit, en s’interdisant de dormir pour créer, aidé par les effets de substances. « Qui dort perd » est la devise.
[…]
Lire l’intégralité de l’article mis en images et en musique sur le site de Poly
On a tous fantasmé Berlin au cours de la période qui a précédé la chute du Mur. Il y avait Iggy Pop et David Bowie dans les années 70, mais il y avait surtout cette scène incroyable dont les sons nous parvenaient avec la part de romantisme qu’on leur associait. Le journaliste et DJ Frédéric Cisnal, qui a vécu à Berlin-Ouest tout au long des années 80, nous livre un récit choral par l’intermédiaire des acteurs mêmes de la scène post-punk et industrielle. Lequel raconte autant un pan d’histoire culturelle de la ville que son cheminement propre.
Consulter le numéro 27 de Zut ! sur Issu.com
Il est journaliste et DJ. Un vrai passionné de musique. Durant quatre ans, Frédéric Cisnal est allé retrouver les artistes berlinois emblématiques de la scène musicale d’avant 1989. Il vient de sortir un livre à l’occasion des 26 ans de la chute du mur, un recueil d’entretiens avec les acteurs qui ont façonné, bâti et écrit la face underground de la musique de Berlin-Ouest, celle-ci n’ayant pu exister qu’à travers une conjugaison de facteurs politiques et historiques. Cette ville accueillait une population bigarrée, un melting-pot unique au monde qui s’est développé en pleine guerre froide, entre les puissances capitalistes et communistes. Cette démarche artistique inconsciente qui n’était pas censée connaître de lendemain reste aujourd’hui le témoignage d’une époque créatrice, marginale et bouillonnante.
Voir l’émission consacrée à Frédéric Cisnal
Il y a quelques temps, Jean Rouzaud était dans le Nova Club de David Blot et vous expliquait pourquoi il ne fallait pas passer à côté du Berlin avant la techno, du post-punk à la chute du mur de Frédéric Cisnal.
Réécoutez la chronique de Jean Rouzaud
Nous poursuivons notre recension d’ouvrages incontournables sur l’histoire du rock, en choisissant cette fois-ci de traiter des villes où se sont développées des scènes musicales essentielles à nos ouïes : Berlin, Detroit, Manchester, Memphis, l’Australie et Los Angeles. Une fois de plus, les ouvrages présentés ici sont récents ou à chiner chez les meilleurs bouquinistes.
Parce qu’elle était grise, pauvre, encore à moitié détruite par la guerre et polluée, parce qu’elle était coupée par un mur, la ville de Berlin a longtemps incarné LA ville des poètes maudits et des artistes undergounds. À tel point que David Bowie y fait venir un Iggy Pop en pleine dépression au début des années 1970, pour l’y faire enregistrer deux superbes albums. Ce n’est pourtant pas aux stars que Cisnal s’est intéressé pour écrire ce livre, mais aux acteurs locaux et néanmoins légendaires qu’on connaît aujourd’hui sous les noms d’Einsturzende Neubauten, Mania D, Matador et Malaria, Die Haut ou encore Mekanik Destrüktiv Kommandöh. En prenant le parti de publier des entretiens, fussent-ils organisés en quatre grandes parties, plutôt qu’un long récit qui aurait été dépersonnalisé, l’auteur rend à cette scène un vibrant hommage en faisant renaître l’humanité et le charme exotique qui la caractérisaient.
Consulter l’article sur Silence Is Sexy