Ce n’est pas un livre sur Woodstock, où d’ailleurs il ne se passa rien […] mais un livre qui permet de comprendre pourquoi 500 000 personnes se sont retrouvées pour vivre trois jours de musique, de paix et d’amour divisant profondément l’Amérique et posant très clairement la diversité des aspirations d’une jeunesse en rupture avec ce qu’il restait du rêve américain de leurs parents.
Éric Serva, France Musique
Revue de presse
Aux rythmes du blues, du folk et du rock psychédélique, En route vers Woodstock de Jean-Marc Bel raconte le cheminement politique et artistique qui mena la jeunesse américaine jusqu’au festival mythique, il y a maintenant 50 ans. Paru pour la première fois en 1994, cet ouvrage remarquable est réédité aux éditions Le Mot et Le Reste.
Sans relâche, les personnages de Sur la route de Jack Kerouac sont à la recherche de « ÇA » : la « pulse ». Ils la trouvent auprès d’une bande de musiciens afro-américains jouant derrière une boîte de nuit à San Fransisco – « ça y est, le sax chope la pulse et tout le monde l’a compris » – ou en partageant leurs visions hallucinées de la route – « la voiture tanguait au rythme de la bonne pulse qu’on tenait nous-mêmes dans notre joie, notre enthousiasme suprême du fait de parler et de vivre jusqu’au bout, jusqu’au néant de la transe ». Publié en 1957, ce livre a eu une influence importante sur les babyboomers, alors adolescents, qui se retrouveront douze ans plus tard au festival de Woodstock. Dans son ouvrage, Jean-Marc Bel ne s’attarde pas sur les performances désormais mythiques de ces trois jours de paix et de musique, au profit d’un autre questionnement : quelles routes durent prendre ces jeunes pour en arriver là ? Pour leurs aînés, marqués par la Grande Dépression, la route conjure des images de familles chassées de chez elles par la pauvreté, les Joads des Raisins de la colère de Steinbeck. Rien à voir avec une quête d’identité et d’authenticité. Les babyboomers sont différents : « Ces adolescents ont l’enthousiasme de ceux qui, eux, n’ont connu ni la dépression, ni la guerre, ni le maccarthysme, et tiennent pour acquise la richesse que produit l’Amérique », explique Bel. Vénérant James Dean, Elvis Presley et Marlon Brando, refusant l’ordre établi « sans autre cause qu’une impression de malaise, (…) sans même rêver d’une autre société », ces rebels without a cause sont rattrapés par la guerre froide et les vieux démons de l’Amérique.
La Marche sur Washington
Certains prennent la route pour défendre le mouvement des droits civiques. Alors qu’en théorie, grâce au boycott des bus de Montgomery initié par Rosa Parks et Martin Luther King, un arrêt de la Cour Suprême a rendu illégale la ségrégation dans les transports depuis 1956, les États du Sud continuent à traiter les voyageurs afro-américains comme des criminels. Pour protester contre cette situation, les premiers freedom rides (« voyages de la liberté ») sont organisés en 1961. Des groupes de voyageurs noirs et blancs empruntent les mêmes bus avec l’intention de traverser le Sud des Etats-Unis et de faire valoir concrètement l’intégration. Des foules les attendent sur leur chemin, armes en main, et de nombreux militants sont mis en prison, malgré la légalité de leur action au niveau fédéral. « Comme au pas de cette vieille femme noire qui, alors qu’on lui demandait si elle n’était pas fatiguée de marcher durant le boycott des bus de Montgomery, avait répondu (…) « si, ami, mes pieds sont très fatigués, mais mon âme est sereine », le mouvement des Noirs pour les droits civiques allaient poursuivre son cheminement souterrain ».
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Découvrez toute la chronique sur le site du NMLèrent-à-woodstock?fbclid=IwAR1rxUrJvVMSqRpUylHGVXXI8oJBR5Hhd4OpUC8znllTpELhe70-vsI1upE
Aux rythmes du blues, du folk et du rock psychédélique, En route vers Woodstock de Jean-Marc Bel raconte le cheminement politique et artistique qui mena la jeunesse américaine jusqu’au festival mythique, il y a maintenant 50 ans. Paru pour la première fois en 1994, cet ouvrage remarquable est réédité aux éditions Le Mot et Le Reste.
Sans relâche, les personnages de Sur la route de Jack Kerouac sont à la recherche de « ÇA » : la « pulse ». Ils la trouvent auprès d’une bande de musiciens afro-américains jouant derrière une boîte de nuit à San Fransisco – « ça y est, le sax chope la pulse et tout le monde l’a compris » – ou en partageant leurs visions hallucinées de la route – « la voiture tanguait au rythme de la bonne pulse qu’on tenait nous-mêmes dans notre joie, notre enthousiasme suprême du fait de parler et de vivre jusqu’au bout, jusqu’au néant de la transe ». Publié en 1957, ce livre a eu une influence importante sur les babyboomers, alors adolescents, qui se retrouveront douze ans plus tard au festival de Woodstock. Dans son ouvrage, Jean-Marc Bel ne s’attarde pas sur les performances désormais mythiques de ces trois jours de paix et de musique, au profit d’un autre questionnement : quelles routes durent prendre ces jeunes pour en arriver là ? Pour leurs aînés, marqués par la Grande Dépression, la route conjure des images de familles chassées de chez elles par la pauvreté, les Joads des Raisins de la colère de Steinbeck. Rien à voir avec une quête d’identité et d’authenticité. Les babyboomers sont différents : « Ces adolescents ont l’enthousiasme de ceux qui, eux, n’ont connu ni la dépression, ni la guerre, ni le maccarthysme, et tiennent pour acquise la richesse que produit l’Amérique », explique Bel. Vénérant James Dean, Elvis Presley et Marlon Brando, refusant l’ordre établi « sans autre cause qu’une impression de malaise, (…) sans même rêver d’une autre société », ces rebels without a cause sont rattrapés par la guerre froide et les vieux démons de l’Amérique.
La Marche sur Washington
Certains prennent la route pour défendre le mouvement des droits civiques. Alors qu’en théorie, grâce au boycott des bus de Montgomery initié par Rosa Parks et Martin Luther King, un arrêt de la Cour Suprême a rendu illégale la ségrégation dans les transports depuis 1956, les États du Sud continuent à traiter les voyageurs afro-américains comme des criminels. Pour protester contre cette situation, les premiers freedom rides (« voyages de la liberté ») sont organisés en 1961. Des groupes de voyageurs noirs et blancs empruntent les mêmes bus avec l’intention de traverser le Sud des Etats-Unis et de faire valoir concrètement l’intégration. Des foules les attendent sur leur chemin, armes en main, et de nombreux militants sont mis en prison, malgré la légalité de leur action au niveau fédéral. « Comme au pas de cette vieille femme noire qui, alors qu’on lui demandait si elle n’était pas fatiguée de marcher durant le boycott des bus de Montgomery, avait répondu (…) « si, ami, mes pieds sont très fatigués, mais mon âme est sereine », le mouvement des Noirs pour les droits civiques allaient poursuivre son cheminement souterrain ».
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Du 15 au 17 août 1969, 500 000 enfants du flower power se retrouvaient à Woodstock. Retour sur la bande-son de ces trois jours « de paix, de musique et d’amour ».
Ne croyez personne au-dessus de 30 ans. » La formule qu’affectionnait cette jeunesse contestataire se vérifiait jusqu’auprès des organisateurs du festival de Woodstock : quatre entrepreneurs dont la somme des âges ne totalisait pas 100 ans. Passionnés de musique mais ayant tout de même un minimum le sens des affaires, ils tablaient sur cette formule du festival pop qui avait connu le succès à Newport en 1965 avec Bob Dylan en tête d’affiche, Monterey en 1967 ou encore à Miami en 1968. Jusque-là, rien n’avait encore été tenté du côté de New York, dont le potentiel était pourtant énorme. Une lacune à combler, donc. D’après leurs calculs à 50 000 spectateurs, ils étaient dans les clous. À 70 000, c’était le jackpot. On sait qu’ils seront au final 500 000 ! Ce qui n’empêcha pas les jeunes businessmen de connaître le douloureux frisson de la déroute financière. Parce qu’au final, les coûts de production, cachets des artistes compris étaient bien plus élevés qu’attendus. Et aussi et surtout parce qu’emportée dans l’élan du flower power et du rejet de l’économie marchande, une masse énorme de spectateurs força l’entrée du festival, sans payer un seul cent. Ce furent les droits du film, réalisé par Michael Wadleigh, assisté d’un certain Martin Scorsese, et de la b.o. qui l’accompagnera, qui remettront à flot les quatre investisseurs. Un film qui fera beaucoup pour la postérité du festival. Elle immortalisera des moments d’anthologie : Jimi Hendrix (le plus gros cachet du festival) crucifiant l’hymne américain en d’électriques distorsions, Joe Cocker et sa version énervée et rugueuse de With a little help from my friends, Santana avec un Soul sacrifice d’une énergie folle où le jeune batteur Michael Shrieve (20 ans !) exécute un solo à couper le souffle, Ten Years After et un I’m going home qui vaudra à Alvin Lee le titre de guitariste le plus rapide à l’Ouest du Pecos… À l’occasion du 50e anniversaire du festival, une réédition en triple CD fait resurgir cet instant exceptionnel dans l’histoire de la musique populaire. Les Who, Jefferson Airplane, Janis Joplin, The Band, Crosby, Stills & Nash… Que du bonheur. Seul regret, mais on imagine qu’il s’agit de tristes problèmes de droits : l’absence dans cette version du passage de Jimi Hendrix – Woodstock 50 th anniversary, chez Rhino. À la bande-son, s’ajoutent les images. Celle du livre-coffret que signe Michka Assayas et dans lequel figure le film de Michael Wadleigh en blu-ray. Fin connaisseur du rock (dont il pilote le dictionnaire dans la très respectable collection Bouquins de chez Laffont), l’auteur y restitue le contexte dans lequel s’inscrivait le festival, et propose une discographie qui documente le meilleur de la scène musicale de la fin des sixties – Woodstock, three days of peace & music, chez GM Éditions. Moins luxueuse, mais embrassant bien plus largement son sujet, la réédition d’_En route vers Woodstock_, du regretté Jean-Marc Bel. Paru en 1994, il s’agit-là d’un ouvrage de référence sur la culture populaire américaine, les évolutions et contradictions de la société dans un pays confronté à la fois à la lutte pour les droits civiques de la communauté afro-américaine et à la guerre du Vietnam. Car si en août 1969, 500 000 jeunes s’étaient réunis sur le site de Bethel pour communier dans la paix, la musique et l’amour, 500 000 autres se battaient au Vietnam. – En route vers Woodstock, éditions Le Mot
et le Reste.
Tandis que 500 000 soldats US se battaient au Vietnam, 500 000 hippies fêtaient Woodstock. Cet ouvrage, passionnant et fraîchement réédité met en lumière le terrible contraste qui fit trembler l’Amérique conservatrice et danser la planète.
Comme le décrypte le regretté Jean-Marc Bel (RIP 2005),Woodstock a révolutionné les consciences. Son analyse embrasse le XXe siècle dans sa globalité : crises sociales, guerres, lutte pour les droits civiques, babyboom, émergence du blues et du rock’n’roll…Tout allait converger dans l’exutoire Woodstock, jusqu’à ce
qu’Hendrix maltraite l’hymne américain au lever du soleil. Plus rien ne serait jamais comme avant.