Il y avait Alain Gerber pour le jazz, on peut désormais compter sur Christian Casoni pour le blues. Sa plume aussi est superbe et ses analyses passionnantes. Car pour écrire aussi bien sur une musique en apparence aussi simple, il faut du talent et Casoni en a à revendre.
Nicolas Ungemuth – Le Figaro
Revue de presse
Les jukes sont de drôles d’établissements que l’on trouve encore dans les campagnes américaines, le long de routes le plus souvent désertiques. C’est à la fois un bistrot, une salle de concert, ça peut être en plus une station-service-alimentation.
Et surtout, ça picole pas mal, et pas que le soir, en écoutant des joueurs de blues locaux. Le juke joint est le nid du blues. Beaucoup sont passés par là. Philippe Manœuvre qui fut longtemps aux manettes du magazine Rock and Folk avait confié les clés du camion blues à Christian Casoni pour animer la chronique Beano Blues. Dans ce copieux ouvrage, Christian fait la compil’ de ses chroniques et dresse le portrait de 110 bluesmen. Il y a des filles aussi. Connus ou pas, disparus ou toujours présents, l’auteur livre dans un texte très court pour chacun et chacune, un instantané d’un moment, d’un lieu, d’une vie dans une écriture hyper rythmée. On a l’impression d’être dans un juke, en train d’écouter et de regarder un vieux bluesman en buvant une bière chaude. On apprend beaucoup, on sourit aussi.
Ce livre est à grignoter par petits chapitres.* Idéal sur une table de nuit si on a déjà les yeux qui se ferment. Ou alors dans les toilettes, c’est pas mal non plus.
Christian Casoni était l’invité de l’émission Entrez sans frapper sur la RTBF pour parler de son livre Juke. 110 portraits de bluesmen.
Une émission à réécouter sur la RTBF
Malgré la pandémie, Le Masque et la plume continue en version confinée et Arnaud Viviant fait du livre de Christian Casoni son conseil de fin d’émission.
“Un truc d’amoureux du blues.”
Christian Casoni est tombé dans la marmite du blues dès son plus jeune âge… Et comme la musique, elle vient de là, dixit notre Johnny national, se plonger dans son univers c’est effectuer, comme le saumon, un prodigieux retour aux sources ! Et c’est ce que vous allez découvrir au fil des pages de cet immense pavé qui se lit comme un recueil de nouvelles (noires, cela va sans dire !) à picorer pour le plaisir. Celui de la découverte, car vous y apprendrez dans un foisonnement de détails la vie et l’oeuvre des artistes plus ou moins célèbres qui ont donné ses lettres de noblesse au blues, mais aussi celui de la lecture, car le style d’écriture de Monsieur Casoni, forgé dans un humour sans faille particulièrement réjouissant, est des plus plaisants ! Vous y trouverez donc les portraits de 110 bluesmen, de Scott Joplin à BB King, dans l’ordre chronologique des enregistrements de leurs disques, construits en mini biographies truffées d’anecdotes, suivis d’une interview de Bruce Iglauer, fondateur du label Alligator, réalisée en 2009. Drôle, instructif et totalement décalé, cet ouvrage, durant cette période de confinement, vous promet de délicieux moments d’évasion tout en élargissant de belle manière votre culture musicale. A vous de fouiner ensuite sur le Net pour aller écouter ces princes (et princesses) qui ont fait le Blues… Et y a matière !!! Enjoy !
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Sont rassemblées ici 110 chroniques de blues écrites par Christian Casoni pour Rock&Folk, précédées d’un avertissement et d’un avant-propos qui laissent penser qu’on en lira peut-être autant sur les artistes que sur l’écrivain. Le format court des chroniques n’empêche pas Christian d’y insérer force détails historiques, signes de son travail de recherche, malgré quelques raccourcis, tout en les enrobant de saillies personnelles, certaines ouvrant d’intéressantes pistes de réflexion, d’autres ressemblant plus à de la provocation, ce qui a le mérite de dynamiser la lecture.
Toutes les époques du blues sont couvertes et la liste des artistes passés en revue permet de constituer une discothèque de haut niveau. Il ne faut pas manquer les deux chapitres sur le blues en France et sur la présence importante de producteurs indépendants d’origine juive. Qu’il nous soit permis de tiquer face à l’absence de Soul Bag dans la bibliographie. Mais, comme pourrait le dire Christian, il y a, malheureusement, autant de chapelles dans le blues en France que dans les campagnes reculées du Mississippi.
La chronique est disponible sur le site de Soul Bag
Par Christian Casoni né en 1958, tour à tour postier, professeur, illustrateur et dessinateur de presse.
Il est rédacteur en chef de Blues Again et pigiste pour Rock&Folk. Philippe Manœuvre lui a confié la rubrique Beano Blues, pour parler du chant des jukes. Ce copieux ouvrage est une anthologie d’articles. Ce sont des portraits, des nécros pour la plupart, rédigés dans l’esprit de nouvelles de série noire. Il faut savoir que la majorité de ces bluesmen étaient natifs de Louisiane, issus de milieux misérables. Certains, trop hélas, ont vu encore enfants, leurs pères assassinés par le Ku Klux Klan. Ces éléments sont importants pour comprendre l’âme de cette musique. Christian Casoni restitue dans un style personnel les facettes de ces destins torturés, de ces vies souvent courtes, de ces musiciens géniaux, guitaristes, harmonicistes, trompétistes, etc, et de ces voix inoubliables. Dans l’avertissement aux lecteurs il écrit : « Une révolution musicale inexplicable qui a exterminé. pour le meilleur ou pour le pire, tous les dinosaures académiques des âges précédents. » Un aperçu des portraits : Bessie Smith l’impératrice, Robert Lockwod, Memphis Slim, Muddy Waters, John Lee Hoocker, Fats Domino, lke Turner, Chuck Berry, B.B King qui disait que chanter le blues c’était être noir deux fois. Et, un texte
sur le blues français, avec une dizaine de portraits. En fin d’ouvrage “Bluesmen noirs, producteurs juifs”. Juifs et Noirs se renvoyaient une image de persécutés. Un ouvrage formidable qui se lit avec intérêt et émotion. Une source inestimable pour les musiciens et les amateurs.
Il y avait Alain Gerber pour le jazz, on peut désormais compter sur Christian Casoni pour le blues. Sa plume aussi est superbe et ses analyses passionnantes. Car pour écrire aussi bien sur une musique en apparence aussi simple, il faut du talent et Casoni en a à revendre.
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Chaque portrait se lit comme une nouvelle, à chaque ligne, la musique résonne. Un livre indispensable pour les adorateurs de cette musique qui en a engendré tant d’autres.
Voici un livre dont il faut lire l’avertissement au lecteur. Car l’auteur (c’est son nom) y explique les choses à savoir sur Juke :
Que ce livre doit se lire par petites doses, un portrait par jour maximum, en dehors des repas.
Que les 110 portraits de bluesmen et blueswomen sont classés n’importe comment, mais surtout par la date du premier enregistrement de chacun.e (ce qui revient au même).
Que l’auteur (il parle de lui à la troisième personne) considère que Louis VI dit le Gros était fait cocu par le rock’n’roll.
Pour le reste, il s’agit d’une fantasque et fantastique collection de notices biographiques (ou carrément des nécrologies, on peut le dire) rédigées avec humour et détachement, comme pour tenter de cacher un amour profond pour cette musique à douze cases (bien essayé !). On n’y croit pas une seule seconde et on surpasse facilement la dose prescrite plus haut, tant cette passion pour la musique et ses interprètes se fait contagieuse.
On trouve aussi un index à la fin (si on cherche un.e musicien.ne en particulier) ainsi qu’un entretien avec Bruce Iglauer, fondateur du label Alligator, à propos d’un sujet hyper important : « Bluesmen noirs, producteurs juifs »…
Et puis, la notice de mon préféré Snooks Eaglin s’ouvre sur « Snooks est un musicien extraordinaire. Question style, il est assez difficile à suivre, comme tous ceux qui ont vécu dans le grand bazar néo-orléanais, transgresseur des orthodoxies musicales. »
Amen.
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Pour vous expliquer le premier mot du titre de cet ouvrage, j’ai deux propositions qui se rejoignent. Un Juke c’est un bar dansant, et j’ai revu la fin du film de John Huston « Asphalt jungle/ Quand la ville dort » quand le seul rescapé du coup s’attarde pour regarder une jeune fille danser… Juke c’est le titre d’un instrumental d’harmonica, enregistré pour figurer sur un titre de Muddy Waters par Marion Walter Jacobs dit Little Walter (page 228). Et bien sûr j’ai comme d’habitude consulté en premier la table des matières pour savoir lesquels des 110 bluesmen je connaissais… (un bon nombre à ma grande surprise). J’en profite pour regretter l’absence d’un index, voire d’une discographie en 110 albums… Je passe sur ma surprise devant l’absence d’un Ray Charles ou d’un Lyle Lovett et mon étonnement devant la présence d’un Chuck Berry que j’aurais plutôt vu côté rock’n’roll. Mais l’auteur se justifie fort bien et dans un style enlevé et foisonnant d’images. Les lecteurs qui écoutent la musique sans connaître le vocabulaire correspondant aux techniques musicales des instruments seront peut-être parfois un peu déroutés mais ils percevront l’enthousiasme et l’humour un peu décalé qui stigmatise certains traits des portraiturés.
Avant d’entamer la lecture et surtout de regarder la table des matières, faites un passage dans votre discothèque pour y trouver les bluesmen que vous aimez. Mettez CD ou vinyle en position et commencez à lire. Vous arriverez vite à « entendre » certains mots techniques et vous comprendrez la dernière phrase de l’avertissement au lecteur : « Les bluesmen ne faisaient la guerre à personne, et ce sont eux qui l’ont gagnée ».
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La notion de “Tout-monde”, la créolisation ou encore la conscience qu’on ne peut pas saisir l’importance du jazz sans prendre en compte l’esclavage… L’écrivain, conteur et essayiste martiniquais Patrick Chamoiseau, prix Goncourt 1992 pour“Texaco”, est une voix qui nous est chère, comme le fut en son temps celle d’Édouard Glissant.
Autant dire que lorsqu’on a appris qu’il signait les notes de pochette de “Soley”, le nouvel album du pianiste Grégory Privat, lui aussi né en Martinique, l’invitation fut très vite lancée pour les réunir dans ce troisième numéro de “Caviar pour tous, champagne pour les autres”, en direct du Jean-Louis La Nuit qui nous accueille pour cette émission mensuelle depuis novembre dernier. Ce nouveau disque de Grégory Privat, sur son label Buddham Jazz, il sort la semaine prochaine, le 31 janvier, et le pianiste sera aussi en concert lundi et mardi prochain au Duc des Lombards. Quant à Patrick Chamoiseau, il va devenir lundi prochain le nouveau titulaire d’une chaire d’écrivain en résidence à Scences Po.
Autre invité de marque dans cette émission, l’historien afro-américain Gerald Horne, de passage au festival Sons d’Hiver cette semaine (mercredi à 19h au Hangar d’Ivry-sur-Seine) pour son livre qui va sortir le 21 février aux éditions Otium, “Paul Robeson, artiste et révolutionnaire”, au sujet de ce chanteur et militant noir un peu oublié aujourd’hui mais qui fut en son temps une véritable icône de la lutte contre la ségrégation… Ce même Paul Robeson qu’une exposition au Musée du Quai Branly, à Paris, en 2018, caractérisait justement comme un homme… du tout-Monde!
Beaux échanges en perspective, avec également le concours du journaliste Christian Casoni pour son livre, “Juke: 110 portraits de bluesmen”, anthologie fraternelle et enlevée d’articles consacrés au blues et publiés par l’auteur dans la revue Rock & Folk. avec à la clé une plume ironique, taquine, voire sacrilège (une plume façon “tout-Monde”, peut-être), comme pour mieux en finir avec tout traitement savant d’une musique aussi populaire-et actuelle. Notre ami Bruno Guermonprez, qui coanime l’émission 59 rue des Archives, a déjà salué ce livre sur les réseaux en évoquant un “verbe généreux, presque gouailleur et toujours rusé, faisant briller une connaissance précise et foisonnante jamais sèche. Grand et fort comme du Saint-Simon !”
Pour clore ce plateau royal, un concert en direct avec sur scène le guitariste Thomas Naïm !
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À l’occasion de la sortie du livre de Christian Casoni, Alex Dutilh déterre quelques perles et inédits du blues.
La séquence des perles et des inédits ressortis de l’oubli. Cette semaine, quelques incunables de la grande histoire du blues à l’occasion la publication de « Juke, 110 Portraits de bluesmen », signé Christian Casoni, aux éditions Le Mot et le reste.
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Le discours petit Blanc empathique sur la zique noire d’antan, c’est comme tout : ça dépend comment c’est fait.
Avec le temps, et c’est heureux, on a appris a détecter ce qui, dans l’inconditionnelle sacralisation blanche du beulouze, initialement sincère et bien intentionnée, pouvait à force se faufiler de « blackface » et de « minstrelsy » plus ou moins consciente (pleurnicher sur l’enfance de Muddy Waters, c’est moins ardu que d’obtenir « la vérité pour Adama »). On a su démasquer également comment son invocation commode avait pu camoufler les paresse et beauferie d’un certain « klassic wack » cliché et chevelu.
Rien de tout ça ici. Ni faux Tosches citant Eschyle à propos des feulements d’un métayer priapique ivre d’alcool à lampe, ni sous Manœuvre ressassant la sourate des trois accords sacrés et douze mesures magiques, Christian Casoni propose dans « Juke » (beau titre ! « Fuck » s’est un temps appelé comme ça) un annuaire ou herbier qui vire chemin faisant à la délectable « curiosité littéraire ».
« 110 portraits » de Bluesmen donc. Pour moitié inconnus (de moi, en tous cas. Or, sans jouer au Lomax de la Porte de Lilas, ça donne quand même idée de l’emplacement du curseur). Son inventaire se picore, un lascar à la fois, deux max. C’est un livre qu’on range aux tines. Et ce sont les inconnus qu’on vient à préférer. Ces vies obscures, dérisoires, oppressées et grandioses nonobstant, finissent, dans leurs répétition et similitudes même, par prendre un tour abstrait, fictif, presque poétique.
Le regard est éclairé et éclairant. La prose plus proche de Jimmy Vaughn que de Stevie Ray (autrement dit, moins de notes, mais murement pesée et réfléchie chacune avant d’être jouée).
Toute la musique qu’il aime… Ça tombe bien, nous aussi. Et donc, par conséquent, ce livre est réussi.
Par Christian Casoni, né en 1958, tour à tour postier, professeur, illustrateur et dessinateur de presse. Il est rédacteur en chef de « Blues again » et pigiste pour Rock & Folk. Philippe Manœuvre lui a confié la rubrique Beano Blues, pour parler du chant des jukes. Ce copieux ouvrage est une anthologie d’articles. Ce sont des portraits, des nécros pour la plupart, rédigés dans l’esprit de nouvelles de série noire. Il faut savoir que la majorité de ces bluesmen étaient natifs de Louisiane, issus de milieux misérables. Certains, trop hélas, ont vu enfants leurs pères assassinés par le Ku Klux Klan. Ces éléments sont importants pour comprendre l’âme de cette musique. Christian Casoni restitue dans son style personnel les facettes de ces destins torturés, de ces vies souvent courtes, de ces musiciens géniaux, guitaristes, harmonicistes, trompétistes, etc, et ces voix inoubliables. Dans l’avertissement aux lecteurs il écrit : « Une révolution musicale inexplicable qui a exterminé, pour le meilleur ou pour le pire, tous les dinosaures académiques des âges précédents. » Un aperçu des portraits : Bessie Smith l’impératrice, Robert Lockwood, Memphis Slim, Muddy Waters, John Lee Hoocker, Fats Domino, Ike Turner, Chuck Berry, BB King qui disait que chanter le blues c’était être noir deux fois. Et, un texte étonnant sur le blues français, avec une dizaine de portraits. En fin d’ouvrage « Bluesmen noirs, producteurs juifs ». Juifs et Noirs se renvoyaient une image de persécutés. Un ouvrage formidable qui se lit avec délice et émotion. Une source inestimable pour les musiciens et les amateurs.