Novembre 1975 : mort de Franco. Avec le décès du Caudillo, l’Espagne ouvre une décennie de folle transition qui l’emporte dans un tourbillon artistique sans précédent. Tous les champs de l’art sont touchés, de la photographie à la mode et au cinéma en passant par la musique, la peinture, le dessin. Cet incroyable élan pop, bigarré, glam et rock, apolitique aussi, est connu sous le label Movida, expression médiatisée au début des années 1980. En réalité, il commence à sévir dès le début des années 1970, avec la propagation d’une contre-culture punk restreinte au domaine musical (el Rrollo). À la fin de la décennie, il atteint d’autres domaines : c’est la nouvelle vague, la nueva ola. Enfin, il se mue en un style plus pop, plus professionnel mais aussi plus commercial, la Movida à proprement parler, qui en est l’apogée mais aussi le terme.
La Movida, au nom du Père, des fils et du Todo vale nous plonge au cœur de cette contre-culture espagnole. On y croise les petites et les grandes figures de ce kaléidoscope hybride et mouvant : la styliste Agatha Ruiz de la Prada, la chanteuse Alaska et ses différentes formations, Radio Futura, les photographes Ouka Leele et Pablo Pérez Mínguez, le dessinateur Ceesepe, le cinéaste Ivan Zulueta, les peintres Costus qui fondèrent la Factory où Pedro Almodovar filme plusieurs scènes de son premier long métrage… Mais loin de confiner au catalogue, cette remarquable étude, issue d’une thèse de doctorat, analyse les traits distinctifs de la Movida, son joyeux art de vivre et sa quête identitaire et postmoderne.
Revue de presse
En novembre 1975, la mort de Franco donne l’occasion à la jeunesse espagnole de revendiquer ses aspirations à la modernité et en particulier à la démocratie, et une ère de renouveau culturel bouillonnant s’engage dans tout le pays. Tandis que différentes scènes souterraines et plus ou moins isolées les unes des autres répercutaient déjà en Espagne des influences venues d’autres pays d’Europe (où triomphe alors la New Wave ou le Punk), l’élan libératoire qui se répand alors dans la société favorise l’émergence d’un mouvement collectif, glam, coloré, punk, provocateurs tout en tournant le dos à la politique : se croisent alors des cinéastes, des groupes de musique, des créateurs et créatrices de mode, des photographes, ainsi des illustrateurs et illustratrices qui tous ensemble dessinent une imagerie et quelques codes artistiques partagés… Dans les années 1980, cette contre-culture est devenue dominante, et elle triomphe commercialement sous le nom de Movida.
Aujourd’hui, Magali Dumousseau-Lesquer nous replonge dans cette époque héroïque de l’art espagnol, ou Pedro Almodovar, la chanteuse Alaska, les photographes Ouka Leele et Pablo Pérez-Mínguez, des groupes de musiques tels que Radio Futura, de nombreux dessinateurs de fanzines ou des peintres étaient susceptibles de se rencontrer aux mêmes soirées…
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En 1975, débarrassée de Franco, l’Espagne redécouvre la démocratie. La censure et la justice d’exception disparaissent, l’ancien ordre moral vole en miettes, ou plutôt en confettis : dans le Madrid de la Movida, la jeunesse s’entiche de drogues, de libertinage et d’excentricités. […]
À la fin de l’émission, Amaury Chardeau présente le livre de Magali Dumousseau-Lesquer comme étant la “bible du sujet”.
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Le festival Lumière s’est clos ce dimanche 19 octobre et Pedro Almodóvar, honoré du Prix Lumière 2014, est déjà reparti. « Ce prix est un hommage rendu à la culture, la chanson et l’art espagnol » nous a-t-il dit. Cinéaste dès les années 80, Pedro Almodóvar s’est rendu célèbre au sein de la Movida, mouvance qui célèbre la liberté postfranquiste. Nous avons voulu savoir quelle était sa place au sein de ce mouvement. Entretien avec Magali Dumousseau-Lesquer, maître de conférences à l’Université d’Avignon et auteur de La Movida, au nom du Père, des fils et du Todo vale (Editions Le mot et le reste, 2012).
Tout sur mon festival : Selon vous, quel a été le rôle de Pedro Almodóvar dans la Movida ?
Magali Dumousseau-Lesquer : La Movida n’est pas un mouvement, elle n’a ni leader, ni manifeste, ni revendication autre que celle de vouloir profiter de la vie sans entraves à la mort du général Franco, alors que s’achève une dictature qui a duré près de 40 ans. Il n’existe donc pas une Movida mais une multitude de movidas personnelles qui correspondent à la façon dont chacun a appréhendé le retour des libertés à Madrid, au milieu des années 70, et la découverte de toutes les possibilités offertes par l’instauration de la démocratie. La movida d’Almodóvar, empreinte d’humour et de provocation, est très visuelle car elle a été photographiée par Pablo Pérez Mínguez et qu’elle apparaît aussi dans certains de ses propres films. Elle n’est qu’une movida parmi beaucoup d’autres, mais le succès international du réalisateur au début des années 90 a participé à mettre en lumière ces images-là. En France, nous ne connaissons guère qu’Almodóvar parmi tous les artistes qui ont pris part au phénomène madrilène, car c’est l’un des rares avec la styliste Agatha Ruiz de la Prada, et les photographes Ouka Leele et Alberto García Alix, à avoir réussi à diffuser largement ses créations hors d’Espagne. Mais la Movida ne se réduit pas à Almodóvar et, à l’époque, il fait partie d’une mouvance, du renouveau culturel et artistique de Madrid au même titre que les peintres Costus, que le photographe Pablo Pérez Mínguez, que le dessinateur Ceesepe et beaucoup d’autres, sans parler des nombreux groupes musicaux qui ont également participé à la rénovation de la création à Madrid et de l’image de la capitale, en Espagne mais également à l’extérieur du pays.
Comment expliquez-vous également que ce réalisateur ait eu un énorme succès et soit la figure de proue du mouvement, alors que les autres réalisateurs (et notamment Ivan Zulueta) n’ont pas pu « s’exporter » ?
À l’époque de la Movida, Almodóvar n’a pas un “énorme” succès en Espagne. Le succès est progressif et il devient manifeste avec Femmes au bord de la crise de nerfs (1989) qui marque véritablement son ouverture à l’international. Dans les années 80, ses réalisations représentent un renouveau (les premières sont choquantes dans l’Espagne du postfranquisme), car elles sont le reflet d’une culture cinématographique autodidacte très variée allant du cinéma trash de John Waters à celui de Fellini, mais également une réinterprétation à la fois punk, glam et pop de l’héritage culturel espagnol légué à la fin du franquisme. C’est notre regard étranger et postérieur au phénomène qui en fait une “figure de proue” de la Movida. Pour les “modernos” de l’époque, Ivan Zulueta est tout aussi important mais sa carrière cinématographique est plus courte, plus “underground”, moins populaire (moins pop). Son film Arrebato (1979) est une référence du cinéma underground de cette période, au même titre que Pepi, Luci, Bom (1980) d’Almodóvar. C’est un film plus conceptuel, une réflexion sur l’utilisation de l’image et sur la notion de dépendance. Le traitement du thème de la drogue notamment y est moins frivole que chez Almodóvar.
[...]
DÉCOUVREZ L’ENTRETIEN AVEC MAGALI DUMOUSSEAU-LESQUER DANS SON INTÉGRALITÉ
Personne ne bouge se déplace à Madrid et rencontre des acteurs de la Movida. Magali Dumousseau-Lesquer intervient en tant que spécialiste de ce phénomène culturel et social. À revoir absolument !
Regardez l’émission ICI
Inspirée par le Pop Art de Warhol, les mises en scène de Vélasquez, ou encore le courant surréaliste, Ouka Leele (qui n’est jamais passée par la « case » école des Beaux-Arts) donne une seconde vie à ses photos en noir et blanc qu’elle repeint par la suite à l’aquarelle, dans des couleurs aussi intenses que son amour immense de la vie et de l’Espagne. Humanité, sensibilité, humour et créativité.
Pour éclairer nos lanternes, Magalie Dumousseau Lesquer était également à nos côtés. Maître de conférences à l’Université d’Avignon, spécialiste de la contre-culture madrilène des années 80 et des courants émergents en Espagne (musique punk-rock, BD, peinture, cinéma, mode, design, photo), elle est également l’auteur de La Movida, au nom du Père, des Fils et du Todo Vale (Marseille, Le mot et le reste, 2011) et a contribué à la direction artistique du cycle consacré à la movida pour le Festival CineHorizontes.
Entretien en toute intimité, presque à l’improviste, et réactions à chaud en ce mercredi 13 novembre, à la sortie du superbe documentaire-hommage « La Mirada de Ouka Leele » de Rafael Gordon (nominé aux Goya du meilleur documentaire en 2009).
Entretien à réécouter ICI
Retour sur le palmarès du festival, débat en direct, avec, sur le plateau, Roxana Nadim, vice-présidente du Festival CineHorizontes, musiques et extraits d’entretien (Magali Dumousseau-Lesquer spécialiste de la contre-culture, le photographe Alberto Garcia Alix, les jeunes réalisateurs Rodrigo Sorogoyen et Daniel Castro). Témoignage précieux d’une Espagne libre et vivante, d’hier, d’aujourd’hui et de demain. À retrouver très bientôt en intégralité sur le site et sur les ondes parallèles de la Grenouille.
À réécouter ICI
L’émission Continent musiques traite de la révolution rock et de la Movida en Espagne. Un beau résumé de l’ouvrage de Magali Dumousseau-Lesquer, ce dernier étant présenté comme la référence en France sur ce mouvement qui changea la face de l’Espagne.
À réécouter sur le site de l’émission
Pour nos amis hispanophones : une interview de Magali Dumousseau-Lesquer par RTVE, l’équivalent de France Télévisions en Espagne :
Magali Dumousseau-Lesquer es profesora de “civilización española” en la Universidad de Avignon (Francia).
En 2012 publicó en su país La Movida. Au nom du Père, des fils et du todo vale (La movida, En el nombre del padre, de los hijos y del “todo vale” Ed. Attitudes, Le mot et le reste ), un libro sobre el la movida “fenómeno cultural y social” que tuvo lugar en España en los 80 del siglo pasado, y que es un resumen divulgativo de su propia tesis universitaria y el resultado de una investigación sobre el terreno.
Esta semana ha presentado en España, en el Instituto Francés de Madrid esta obra cuya portada — La gitana mulata de Pablo Pérez Minguez y un Cristo de la serie El valle de los caídos de Costus — es, como el título un buen resumen de su acercamiento a ese “loco decenio de explosión de creatividad artística en España”
Dumousseau-Lesquer, que habla perfectamente nuestro idioma, pretende ahora editar también su obra en español. Hemos podido hablar con ella sobre este trabajo; el primer análisis serio sobre la movida realizado desde el país vecino.
RTVE.es: ¿Cómo fue su aproximación a la movida, un fenómeno no demasiado conocido en Francia?
Desde hace tiempo me interesa la contracultura en Francia y en general. Cuando tuve que realizar un trabajo final de maestría por un fenómeno español que en España comenzó a conocerse tarde, gracias a Pedro Almodóvar y trabajos suyos más tardíos, no coincidentes exactamente con la movida, como por ejemplo Mujeres al borde de un ataque de nervios
El proyecto se tituló “Almodóvar y las mujeres de la movida: Alaska, Agatha, Ouka Lele y otras chicas…” Luego el proyecto se amplió hasta llegar a ser un tratado sociológico, en forma de tesis. El libro actual sería “una vulgarización” de aquella tesis.
En la investigación que emprendió para acercarse a la movida, Agatha Ruiz de la Prada fue fundamental…
Alguien la definió como una “chispa de color en un mundo negro”. Agatha que es una mujer fascinante muy relacionada con la cultura francesa en la que se educó me proporcionó mucha información sobre su propias creaciones, que también pueden considerarse, especialmente las de aquella época, como manifestaciones artísticas de la movida, y además me puso en contacto con muchos personajes clave de la movida
¿Como organizó ese trabajo de investigación que ahora ha volcado en este libro?
He divido mi exposición en tres partes. Primero, cronología de la movida. Segundo, estudio del comportamiento e impresiones de quines participaron en ella. Y tercero, análisis del “todo vale” y la abundancia que generó la movida; un estudio de productos de la movida como vestidos, letras de canciones o pinturas.
¿Cómo resumiría lo que fue la movida?
Podríamos definir la movida como un fenómeno socio-cultural que se inicia en los 70 para conducir la necesidad de expresarse después de largos años de dictadura. Y lo hace con artes rápidas, como el tebeo, el punk o el pop. Alguien por ejemplo como Alaska, que era una adolescente que no sabía ni tocar ni cantar, podía subir a un escenario para cantar…
¿El “todo vale” sería la filosofía de la movida?
El “todo vale” nace de la contracultura pero no es un arte de ruptura. Es un arte de reciclaje, de restauración de gestión en definitiva de la herencia del franquismo
La movida era apolítica pero plantea el asunto de qué hacer con el legado de Franco, cuya cultura podía verse negativamente. Se produce una crisis de valores que pone en duda esa herencia. Primero, se plantean olvidar; sería la explosión del punk, glam, pop-art. Pero finalmente se optaría por construir una memoria propia, conviviendo con algunos elementos anteriores y eliminando otros. Y añadiendo, componentes foráneos.
Lo vemos por ejemplo, en algunos cuadros del colectivo Costus que recrean la rica tradición pictórica religiosa española, pero eliminan elemento asociados a Cristo como la cruz o la corona de espinas.
En este sentido, la movida sería como “una limpieza” del patrimonio anterior.. Transmitir ese patrimonio pero no como lo recibieron
En su trabajo se ha detenido en la obra pictórica de Costus. ¿Cree que se ha tomado en serio esa obra por parte del mundo del arte más académico?
No. No tienen el reconocimiento que merecen. Y ellos son fundamentales. Estudiaron el patrimonio nacional (véase la muestra Temas de Arquitectura Nacional y Otros Monumentos que Enrique Naya presentó en 1978). Trabajaron los tópicos de la identidad española de modo sorprendente. En la serie de las “muñecas de Marín” no retrataron a las bailaoras sino a las muñecas que las representaban y que se solían poner encima de los televisores.
¿En qué momento de la post-movida estaríamos ahora?
Cómo te decía, primero hubo un momento de amnesia, luego de construcción de la memoria, y ahora estaríamos en un regreso de la memoria histórica. Algo que se manifiesta en artistas actuales como Fernando Sánchez Castilla, Paula Rubio Infante o Eugenio Merino que ha utilizado la propia figura del caudillo en sus propuestas.
Artistas como éstos, a mi juicio, están acabando un trabajo comenzado en la movida.
Article sur La Movida, Au nom du Père, des fils et du todo vale pour les hispanophones :
Texto: MARÍA CONDADO
Fotos: TODO ALMODÓVAR; NVIVO; FROG 2000; SOMOS
MALASAÑA.
A veces resulta necesario revisitar algunos
aspectos de nuestra cultura más reciente que, por
el hecho de haberse desarrollado hasta no hace
demasiado tiempo, creemos que están claramente
definidos. Pues bien, este pensamiento no es del
todo cierto ya que con el paso del tiempo los
movimientos culturales se van diluyendo mientras
otros adquieren mayor solidez. Como inequívoco
resultado de esta constante situación de cambio
encontramos que la sociedad va dejando en el
olvido características, historias y sensaciones de
unas manifestaciones culturales que pensaba quenunca podría dejar de lado.
En cambio, esto no sucede con la Movida Madrileña,
el movimiento cultural por antonomasia de los años
80. Numerosas publicaciones (casi
siempre reflejando el punto de vista español) han
hecho referencia a este momento de la historia
reciente de la capital. Pero ¿cómo ven nuestros
vecinos franceses la explosión cultural que supuso
la Movida? La respuesta la encontramos en el libro
de Magali Dumousseau-Lesquer, _La Movida: au nom du père,
des fils et du todo vale_ (Éditions Le Mot et le Reste,
2012), donde se nos ofrece un amplio y
completísimo recorrido a través de la Movida,
centrando al lector en sus protagonistas y en las
muchas manifestaciones artísticas que se llevaban
a cabo.
Para ello, la autora nos lleva a los orígenes de
la Movida: la muerte de Franco. El caudillo,
identificado con el tradicional padre de familia,
dejó huérfanos a un gran número de artistas que
hasta aquel entonces habían desarrollado su obra dentro del ámbito de
la contracultura, de forma oculta y anónima para
un público totalmente ajeno a sus ideas. Así que,
la definitiva desaparición del dictador supuso una
auténtica liberación para estos creadores-
adolescentes que comenzaron a poblar la capital,
inspirados en el punk inglés, pero embargados por
un espíritu más positivo que el del ‘’No Future’’
británico. Y es que, ciertamente tenían motivos
para estar esperanzados: la democracia les estaba
abriendo puertas desde el punto de vista artístico
y social, y en consecuencia, el futuro les
pertenecía.
Es así como, en primer lugar, Dumousseau-Lesquer
describe con gran acierto el ambiente de Madrid
por aquel entonces: era una ciudad gris, marchita
y deprimida. Sin embargo, muestra como con el
trascurso de los años se sucedieron una serie de
oleadas culturales (el Rrollo Underground, la
Nueva Ola y la Movida) que convirtieron
a Madrid en una especie de Nueva York europeo, es
decir, la envidia de toda capital que desease
figurar en el primer puesto de la vanguardia
artística interdisciplinar. Con el fin de apoyarse
en esta idea, la autora cuenta con fotografías,
pinturas, extractos de canciones, opiniones y
testimonios de algunos de los personajes más
relevantes de aquel período: Alberto García Alix,
Pablo Pérez Mínguez, Ágatha Ruíz de la Prada, Las
Costus, Ouka Leele, Ceesepe, Alaska o Pedro
Almodóvar entre otros.
Tal y como se muestra en el libro que estamos
tratando, todos estos artistas encontraron en
Madrid (concretamente El Rastro y barrios como
Malasaña) el lugar ideal para desarrollar su
concepto del arte y de la vida: inspirándose lunos a los otros, sirviéndose de los medios de comunicación para contagiar al público general con
su vitalidad, disfrutando cada momento como si
fuera el último, ya que tenían muy presente el
axioma de ‘’sólo se vive una vez’’... Ese ‘’carpe
diem’’ y esa irreverencia pop es lo que aflora en
las películas, comix underground, fanzines y
revistas propias de La Movida. De hecho, en todas
estas publicaciones no encontramos referencias a
la política de la época, ni un manifiesto que les
integrara dentro de un grupo artístico en
concreto, por lo que precisamente rechazaban el
término ‘’Movida’’.
En definitiva, quieran o no, el complejo fenómeno
de la Movida forma ya parte de nuestro imaginario
colectivo y por ello, merece la pena aél. Nosotros somos sus herederos.
Aujourd’hui Magali Dumousseau-Lesquer, une Française passionnée par l’Espagne et l’espagnol, qu’elle enseigne d’ailleurs à l’Université d’Avignon, nous parle de la Movida, ce courant de contre-culture qui secoue l’Espagne dans les années 70 et 80. Elle a publié un livre à ce sujet “La Movida. Au nom du Père, des Fils et du Todo Vale”. Mais on commence par une petite carte postale signée Julie Frénoi (18/02/13).
Une émission à réécouter ICI
En un peu plus de 300 pages, la spécialiste de la contre-culture espagnole Magali Dumousseau-Lesquer retrace la «Movida», une folle décennie d’explosion de créativité artistique qui a touché tous les champs de l’art en Espagne entre 1975 (fin du franquisme) et les années 1980. Scindé en brèves sections abordant aussi bien la mode que la musique, le dessin, la peinture ou le cinéma, l’ouvrage raconte les diverses facettes de cette vague transgressive marquée par le refus des valeurs traditionnelles, la libération des mœurs, les conduites à risques et l’émergence d’une contre-culture nocturne festive vite surnommée Movida, du verbe mover – bouger, en espagnol. Le cinéaste phare de ce courant, Pedro Almodovar, se révèle en 1980 avec Pepi, Luci, Bom et les autres filles du quartier, son premier film diffusé dans le circuit régulier. Dans son essai, la chercheuse française souligne le fait que la Movida a été précédée, dès le début des années 1970, par une contre-culture punk limitée au domaine musical, le «Rrollo». Au fil des pages illustrées de photos, d’affiches et de dessins qui sont autant d’instantanés de ce bouillonnement, on croise, outre Almodovar, les stars de tous calibres de la Movida, comme la chanteuse Alaska, le photographe Alberto García Alix ou la styliste Ágatha Ruiz de la Prada. L’essayiste met l’accent sur la volonté d’oubli du passé, l’amnésie volontaire des movidistas, cette volonté de table rase précédant l’avènement d’un style plus «pro» mais également plus commercial qui va marquer alors le déclin puis la fin de la Movida. Un livre foisonnant, vivant, dynamique qui familiarise le lecteur avec une explosion d’audace et de liberté pas si éloignée.
La Movida est mentionnée dans les repères bibliographiques de la Lettre du Syndicat Français de la Critique de Cinéma.
Le 3 octobre 2012 avait lieu à la galerie parisienne de la styliste Agatha Ruiz de la Prada une soirée spéciale Movida autour de l’ouvrage de Magali Dumousseau-Lesquer, en présence de l’auteur, d’Agatha, qui a signé la préface de l’ouvrage, et du professeur Emmanuel de la Vagueresse, avec l’aimable participation de la librairie Palimpseste.
Découvrez la vidéo de la soirée, comprenant une interview d’Agatha et de Magali, ICI
Buenas tardes muchachos y muchachas. Ce soir, on reviendra sur les bases très do-it-yourself de la Movida espagnole, le créateur de la série The Wire, David Simon, nous donnera quelques trucs pour tuer votre voisin sans se faire répérer (trop rapidement) par la maréchaussée, on mesurera l’effet de groupe sur nos convictions personnelles, on écoutera Henry James se plaindre de l’arrivée du chemin de fer sur l’île de Wight et je vous proposerai un jeu, une sorte de roman interactif dont vous seriez, non pas le héros, mais carrément l’auteur. Drôlement chouette, hein ?
22h10_ David Simon, Baltimore (« Pour assassiner quelqu’un… »).
22h25_ Justin Cartwright, La Promesse du Bonheur.
22h40_ Magali Dumousseau-Lesquer, La Movida.
23h00_ Cass R. Sunstein, Anatomie de la rumeur.
23h10_ Henry James, Heures anglaises.
23h25_ Michiel Heyns, La Dactylographe de Mr. James.
23h40_ Megan Abbott, La Fin de l’innocence.
Après la mort de Franco, en 1975, dans l’élan de la transition démocratique, l’Espagne et Madrid en particulier, ont connu une vague sans précédent de créativité tous azimuts, de remise en cause des valeurs traditionnelles et de libération des mœurs, avec le déferlement transgressif d’une contre-culture nocturne et festive qui s’est vite trouvée un nom: la movida. Le mot vient de mover, qui signifie «bouger» mais il emprunte en fait à l’argot de la drogue.
La Movida a ses lieux, ses égéries et ses icônes, comme la muse gay de Pedro Almodovar, Fanny Mc Namara, ses artistes déjantés, de la peinture à la mode, la photographie ou la BD, ses nuits brûlantes, sa presse underground et elle gagne vite d’autres villes espagnoles: Barcelone, Bilbao, Vigo en Galice, Valence, Séville. A Madrid s’ouvrent des ateliers-cuisine, sur le modèle de la Factory d’Andy Warhol, qui vient en 1983 présenter ses dernières séries de pistolets, croix et couverts dans la galerie de Fernando Vijande et découvre à cette occasion la Movida à son apogée. Selon la styliste Agatha Ruiz de la Prada, «pendant une semaine, la ville de Madrid toute entière est devenue une grande fête». Mais le pape du pop’art ne semble guère partager l’enthousiasme de ses hôtes, ni s’intéresser plus que ça à leurs performances et leurs productions artistiques.
On l’a dit, le phénomène a explosé à la faveur de conditions politiques favorables, qu’il a en quelque sorte renforcées. A la fin du franquisme, Madrid est le siège du pouvoir socialiste, celui du gouvernement de Felipe Gonzalez, celui de la récente Communauté autonome de Madrid, et celui d’une ville dont le maire est l’intellectuel Enrique Tierno Galvan, qu’on surnomme «le vieux professeur», un philosophe qui a connu les geôles franquistes et l’exil et qui est en passe de devenir «le maire de la movida». Socialement parlant, la composition de cette jeunesse bohème et festive est très diverse, la mixité sociale étant encouragée par le mode de vie et l’esthétique punk du Rrollo qui précède la Movida, ce qui donne au mouvement son extension maximale. Les provocations sexuelles ou blasphématoires, les conduites à risques, l’adjuvant de la création artistique créent les conditions de l’osmose pour une jeunesse née après les traumatismes de la guerre civile et de la période la plus noire de la dictature.
Magali Dumousseau-Lesquer insiste à juste titre sur la dimension d’oubli qui caractérise la Movida. L’amnésie volontaire est le signe des recommencements et celui-là n’échappe pas à la règle, il en est même une extraordinaire illustration. Après viendra le temps de la récupération, les hommes politiques qui s’invitent à la discothèque El Sol et s’habillent en Adolfo Dominguez. Et puis celui du désenchantement. Viendra aussi le temps du retour de la mémoire, mais de la nébuleuse brouillonne et créative de la Movida, certains sont restés des figures emblématiques. Avec Femmes au bord de la crise nerfs, plusieurs fois primé, et notamment au Festival de Venise, Almodovar exporte à la fois l’esprit de la Movida et la lettre de sa signature.
SOMMAIRE
— De l’ombre à la lumière artificielle
— On ne vit qu’une fois
— Le Todo vale, une restauration postmoderne
L’émission est à réécouter ICI
Après la mort de Franco, en 1975, dans l’élan de la transition démocratique, l’Espagne et Madrid en particulier, ont connu une vague sans précédent de créativité tous azimuts, de remise en cause des valeurs traditionnelles et de libération des moeurs, avec le déferlement transgressif d’une contre-culture nocturne et festive qui s’est vite trouvée un nom : la movida. Le mot vient de mover, qui signifie « bouger » mais il emprunte en fait à l’argot de la drogue. « Hacer una movida » signifiait quitter le centre de Madrid pour s’approvisionner en banlieue. Il était déjà utilisé par les mouvements qui ont précédé et préparé le terrain à la Movida, dès le début des années 70, le Rrollo et la Nueva Ola, nés dans les quartiers populaires de la capitale et essentiellement musicaux. Ce qui fait de Madrid le creuset, puis le chaudron de cette mouvance irrésistible, c’est son caractère cosmopolite. Comme dit le photographe Juan Ramon Yuste : « Madrid accueille tout le monde, d’où qu’il soit. Madrid n’a pas d’identité ». C’est pourquoi on dit que les plus belles femmes s’y trouvent, comme un concentré de tous les caractères des différentes régions d’Espagne.
La Movida a ses lieux, ses égéries et ses icônes, comme la muse gay de Pedro Almodovar, Fanny Mc Namara, ses artistes déjantés, de la peinture à la mode, la photographie ou la BD, ses nuits brûlantes, sa presse underground et elle gagne vite d’autres villes espagnoles : Barcelone, Bilbao, Vigo en Galice, Valence, Séville. A Madrid s’ouvrent des ateliers-cuisine, sur le modèle de la Factory d’Andy Warhol, qui vient en 1983 présenter ses dernières séries de pistolets, croix et couverts dans la galerie de Fernando Vijande et découvre à cette occasion la Movida à son apogée. Selon la styliste Agatha Ruiz de la Prada, « pendant une semaine, la ville de Madrid toute entière est devenue une grande fête ». Mais le pape du pop’art ne semble guère partager l’enthousiasme de ses hôtes, ni s’intéresser plus que ça à leurs performances et leurs productions artistiques. Aucune mention dans son journal mais il aurait trouvé le temps d’aller au musée du Prado. Sinon il a trouvé les gens très sexy et Pedro Almodovar se souvient de lui, promenant son indifférence en exhibant son égocentrisme et en « donnant l’impression d’une caméra dont le magasin n’aurait pas été chargé ».
Le cinéma, comme la musique, est l’un des fers de lance de la Movida. Comme le rappelle le photographe Pablo Pérez-Minguez, « la Movida est très documentaire ». On le voit dans ses photos nocturnes qui shootent – je cite – « ceux de la coke, du caballo, des joints, ceux qui avaient trop bu ». Si un réalisateur comme Ivàn Zulueta signe des films très conceptuels et travaille le matériau de l’image, Pedro Almodovar, dans ses premiers court métrages comme Sexo va y sexo viene, ou Folle, folle, folleme, Tim, exprime sans ambages l’air débridé du temps. Son premier long métrage, Pepi, Luci, Bom et autres filles du quartier, qui est l’adaptation de sa bande dessinée Erecciones generales parue dans la revue de Barcelone El Vibora, est tourné en fonction du temps, des moyens et de la disponibilité des amis et il reste le meilleur tableau de la génération movida, certaines scènes ayant été tournées dans la Factory des Costus, deux peintres qui apparaissent dans le film alors qu’ils peignent des poupées flamencas, dont on peut voir dans le livre de Magali Dumousseau-Lesquer une version expressionniste, brillante et joyeuse en Sophia Loren, une fresque de l’un des hauts lieux de la nuit madrilène, la bien nommée Via Làctea.
On l’a dit, le phénomène a explosé à la faveur de conditions politiques favorables, qu’il a en quelque sorte renforcées. A la fin du franquisme, Madrid est le siège du pouvoir socialiste, celui du gouvernement de Felipe Gonzalez, celui de la récente Communauté autonome de Madrid, et celui d’une ville dont le maire est l’intellectuel Enrique Tierno Galvan, qu’on surnomme « le vieux professeur », un philosophe qui a connu les geôles franquistes et l’exil et qui est en passe de devenir « le maire de la movida ». Socialement parlant, la composition de cette jeunesse bohème et festive est très diverse, la mixité sociale étant encouragée par le mode de vie et l’esthétique punk du Rrollo qui précède la Movida, ce qui donne au mouvement son extension maximale. Les provocations sexuelles ou blasphématoires, les conduites à risques, l’adjuvant de la création artistique créent les conditions de l’osmose pour une jeunesse née après les traumatismes de la guerre civile et de la période la plus noire de la dictature. Magali Dumousseau-Lesquer insiste à juste titre sur la dimension d’oubli qui caractérise la Movida. L’amnésie volontaire est le signe des recommencements et celui-là n’échappe pas à la règle, il en est même une extraordinaire illustration. Après viendra le temps de la récupération, les hommes politiques qui s’invitent à la discothèque El Sol et s’habillent en Adolfo Dominguez. Et puis celui du désenchantement. Viendra aussi le temps du retour de la mémoire, mais de la nébuleuse brouillonne et créative de la Movida, certains sont restés des figures emblématiques. Avec Femmes au bord de la crise nerfs, plusieurs fois primé, et notamment au Festival de Venise, Almodovar exporte à la fois l’esprit de la Movida et la lettre de sa signature.