Revue de presse
Je ne vais pas vous faire l’affront de vous présenter le musicologue Christophe Brault, qui anime l’émission Music Machine depuis …pff … 79 podcasts, me dit-on dans l’oreillette, ni de vous parler du célèbre conférencier, ni même de l’érudit universitaire, mais j’ai néanmoins croisé Christophe Brault dans une vie antérieure. Au début des années 90, je m’étais retrouvé quasi seul à errer dans les rayons de feu Rennes Musique le seul disquaire qui comptait dans l’ouest. Il m’était tombé dessus sans que je m’y attende. « Vous cherchez quelque chose ? ». Agressé dans mes rêveries, j’avais jeté mon dernier atout : « Vous auriez, Cut l’album des Slits ? Des punkettes ! ». « Oui ! Bien sur, tenez ! » .. dit-il en me refilant le disque (introuvable) dans les mains … un disque à 140 Frs … une fortune … Pris à mon propre piège me voilà redirigé vers la caisse la plus proche avec ce qui s’avérera l’un de mes disques préférés.
Je m’éloigne du sujet, mais c’est aussi, chez Rennes Musique, que je découvrais pour la première fois, le rock garage, via une compile fabuleuse « The Sound Of The Sixties, Vol.1 », car à l’époque le rock garage s’appelait le rock sixties, c’est à dire, la musique de ces milliers de groupes qui s’étaient pris la British Invasion dans les gencives.
Petit rappel des faits. En 1964, les Beatles débarquent en francs tireurs chez l’oncle Sam. En 5 petites minutes, leur Mersey Beat, fracasse tout l’édifice de la musique Pop américaine. A partir de cet instant, et mis à part l’écurie Motown qui échappe à la noyade, ce seront les petites teignes anglaises qui vont donner le La.. Aux quatre coins du pays fleurissent des formations dont la plupart ne connaîtront d’autre gloire que celle des voisines venues espionner ces grands dadais jouant dans le garage de leurs parents. Quelques fois, certains s’échapperont des garages familiaux et il paraît même que certains connaîtront une gloire éphémère.
Le rock garage, ce sont, les survivants de l’oubli, ceux qui ont réussi à sortir de la pénombre des hits parade, tous ces ‘One Hit Wonder’ qui furent compilés par Lenny Kaye, le futur guitariste de Patti Smith. En 1972, Jac Holzman patron d’Electra, le charge de regrouper ses titres préférés pour sortir un double album, Nuggets: Original Artyfacts from the First Psychedelic Era, 65–68. Ne ménageons pas nos mots, ceci représente les tables de loi du rock, qu’il soit garagiste ou pas. 28 titres explosifs, pop, folk ou psychédéliques, tout est génial, du moindre couinement d’orgue Farsifa, de ces solos sur 3 notes gavés de fuzz aux chants habités à peine couverts par des chœurs bancals. En 1998, Rhino, le fameux label de rééditions, sortira un coffret de 4 disques, quadruplant ainsi le volume des saintes écritures.
Non content d’eux, Rhino double l’exploit en éditant en 2001, l’équivalent du 1er coffret Nugget, mais cette fois ci, sur les pays de l’Empire Britannique. Une nouvelle fois, c’est l’orgie, Rhythm’n blues, Mersey Beat, Pop magistrale, Mod, Freakbeat, Psychédélisme, rien ne nous est épargné. Le son Américain se démarque des Anglais par un son plus brut, mais attention, difficile de faire un choix tant le niveau est élevé de part et d’autre de l’Atlantique.
Si initialement, le rock garage est une invention américaine, on voit bien qu’avec le temps on finit par mettre dans le même panier, ceux qui influencent et les influencés. J’ai toujours vu le rock sixties comme un oignon. Au centre, les leaders, puis dans les couches périphériques les outsiders par ordre d’importance. On aurait par exemple, au 1er niveau les Beatles et les Rolling Stones. Au 2ème niveaux, ce serait les Kinks et les Who. Au 3ème, les Pretty Things, Them, Yardbirds, Small Faces etc. Intellectuellement parlant, j’aurais du mal à classer les garagistes, dans les groupes avant le 4ème niveau, même si certain titres pris séparément pourraient y figurer, comme le « Midnight To Six » des Pretty Things voir un « You Really Got Me » des Kinks.
Pour Christophe Brault, la frontière n’est pas si claire. Dans la liste des albums chroniqués, on retrouve un Kinks, un Who, un Pretty Thing, un Them, un Yardbirds et même le 1er Stones. Finalement le Link Wray, l’indien, pionnier du Rock & Roll et de la surf musique est un choix moins incongru, tant son influence fut grande chez les futurs garagistes. Quoi qu’il en soit, toute liste est forcement soumise à débat.
Les choix faits ici sont globalement les bons, on retrouve bien évidement la crème de la crème : le Count Five et son excellente pochette avec le groupe photographié comme s’il regardait un cercueil mis en terre, les furieux Sonics de Tacoma, les Monks, faux moines dada avec tonsures et robes de bures de rigueur, les Seeds, des illuminés menés par le givré Sky Saxon, dont nous avons déjà parlé ici. Je passe sur les Remains, un peu lisses et sur le 13th Floor Elevator de Roky Erikson croisé aux Transmusicales, pour m’arrêter sur Question Mark et ses Mysterians coupables du seul n°1 de la sélection, l’imparable « 96 Tears », oublié des compiles Rhino pour d’obscures raisons de droits. Le titre avec son orgue hypnotique et obsédant est surnagé par le chant tremblotant de Rudy Martinez et pour les paroles, je laisse aux mathématiciens le soins de vous en expliquer la teneur. On trouve aussi le 1er album de The Litter dont la reprise « Action Woman » est l’archétype du genre entre calme et fureur, le tout gavé de guitare fuzz. L’autre pépite de leur album est la reprise électrifiée du classique folk de Buffy Sainte Marie, Codeine. Dans les choix moins académiques, on croise les Texans de Zakary Thanks et leur Bad Girl joué à Mach 3. On a à peine le temps de respirer.
Chez les anglais, les choix sont plus étonnants. Hormis les ténors (Stones, Kinks, Who, etc.), on trouve les Animals, groupe que j’ai encore une fois du mal à classer dans le genre Garagiste. Par contre, les Downliners Sect, et leur Rhythm’n Blues sont un morceau de choix et ils seront l’influence majeure de Billy Childish l’immense activiste Garagiste anglais de la fin du XXème siècle. Avec les Birds, on touche une veine Mods avec un ancrage encore très Rhythm’n Blues mais plus acéré. Dans leur rang, un futur Stones, le petit Ron Wood qui fait encore ses classes. Avec The Action, c’est l’autre volant de la culture Mod avec une inspiration très prononcée pour la Soul sur laquelle la voix suave de Reg King fait des miracles. La reprise du « I’ll Keep Holding On » des Marvelettes est un modèle du genre. Au croisement du Rhythm’n Blues original, du psychédélisme et saupoudré de fureur Mods, existe un genre vénéré par les esthètes gavés d’amphétamine, le Freakbeat. Même si le genre n’a aucune existence légale, il permet de regrouper les groupes les plus furieux dans un même panier. On trouve ici, The Sorrows, The Eyes, Fleur De Lys, Creation, The Smoke et même les Birds sur certains titres. On ne va pas épiloguer sur le sujet, tout est bon et même très bon, c’est la quintessence du Rock anglais entre 65 et 67. Enfin, finissons sur le cas Troggs. Pour des raisons obscures, ce groupe qui jouaient dans les premières catégories, a été relégué au fil du temps dans les oubliettes de l’histoire. On peut considérer les Troggs comme des Seeds anglais. Ils étaient alors sur le devant de la scène, ils composaient de bons albums et ont même eu 2 n°1 dans les hits, dont l’insurpassable « Wild Thing ». Mais leur musique un peu trop sauvage, qui inspirera aussi bien le Hard Rock que les Punks, les poussera vers les groupes de zone B, puis de zone Z.
Bon, je ne vais pas tout dévoiler non plus, mais il y est aussi question du revival garagiste du début des années 80 (Barracudas, Cramps, Fleshtones, Pandoras, etc.), puis des années 2000 qui entérine le genre dans ceux qui comptent.
Si on fait l’impasse de la bande son, le livre se lit relativement vite, mais il prend une autre saveur lorsqu’on prend le temps de déguster chaque page en écoutant religieusement les titres proposés. L’ouvrage est plutôt à destination des novices, mais l’amateur trouvera aussi son compte en découvrant à coup sûr de nouvelles pistes pour étancher sa soif de cambouis.
Lire la chronique sur le site de Alter1fo
Je ne vais pas vous faire l’affront de vous présenter le musicologue Christophe Brault, qui anime l’émission Music Machine depuis …pff … 79 podcasts, me dit-on dans l’oreillette, ni de vous parler du célèbre conférencier, ni même de l’érudit universitaire, mais j’ai néanmoins croisé Christophe Brault dans une vie antérieure. Au début des années 90, je m’étais retrouvé quasi seul à errer dans les rayons de feu Rennes Musique le seul disquaire qui comptait dans l’ouest. Il m’était tombé dessus sans que je m’y attende. « Vous cherchez quelque chose ? ». Agressé dans mes rêveries, j’avais jeté mon dernier atout : « Vous auriez, Cut l’album des Slits ? Des punkettes ! ». « Oui ! Bien sur, tenez ! » .. dit-il en me refilant le disque (introuvable) dans les mains … un disque à 140 Frs … une fortune … Pris à mon propre piège me voilà redirigé vers la caisse la plus proche avec ce qui s’avérera l’un de mes disques préférés.
Je m’éloigne du sujet, mais c’est aussi, chez Rennes Musique, que je découvrais pour la première fois, le rock garage, via une compile fabuleuse « The Sound Of The Sixties, Vol.1 », car à l’époque le rock garage s’appelait le rock sixties, c’est à dire, la musique de ces milliers de groupes qui s’étaient pris la British Invasion dans les gencives.
Petit rappel des faits. En 1964, les Beatles débarquent en francs tireurs chez l’oncle Sam. En 5 petites minutes, leur Mersey Beat, fracasse tout l’édifice de la musique Pop américaine. A partir de cet instant, et mis à part l’écurie Motown qui échappe à la noyade, ce seront les petites teignes anglaises qui vont donner le La.. Aux quatre coins du pays fleurissent des formations dont la plupart ne connaîtront d’autre gloire que celle des voisines venues espionner ces grands dadais jouant dans le garage de leurs parents. Quelques fois, certains s’échapperont des garages familiaux et il paraît même que certains connaîtront une gloire éphémère.
Le rock garage, ce sont, les survivants de l’oubli, ceux qui ont réussi à sortir de la pénombre des hits parade, tous ces ‘One Hit Wonder’ qui furent compilés par Lenny Kaye, le futur guitariste de Patti Smith. En 1972, Jac Holzman patron d’Electra, le charge de regrouper ses titres préférés pour sortir un double album, Nuggets: Original Artyfacts from the First Psychedelic Era, 65–68. Ne ménageons pas nos mots, ceci représente les tables de loi du rock, qu’il soit garagiste ou pas. 28 titres explosifs, pop, folk ou psychédéliques, tout est génial, du moindre couinement d’orgue Farsifa, de ces solos sur 3 notes gavés de fuzz aux chants habités à peine couverts par des chœurs bancals. En 1998, Rhino, le fameux label de rééditions, sortira un coffret de 4 disques, quadruplant ainsi le volume des saintes écritures.
Non content d’eux, Rhino double l’exploit en éditant en 2001, l’équivalent du 1er coffret Nugget, mais cette fois ci, sur les pays de l’Empire Britannique. Une nouvelle fois, c’est l’orgie, Rhythm’n blues, Mersey Beat, Pop magistrale, Mod, Freakbeat, Psychédélisme, rien ne nous est épargné. Le son Américain se démarque des Anglais par un son plus brut, mais attention, difficile de faire un choix tant le niveau est élevé de part et d’autre de l’Atlantique.
Si initialement, le rock garage est une invention américaine, on voit bien qu’avec le temps on finit par mettre dans le même panier, ceux qui influencent et les influencés. J’ai toujours vu le rock sixties comme un oignon. Au centre, les leaders, puis dans les couches périphériques les outsiders par ordre d’importance. On aurait par exemple, au 1er niveau les Beatles et les Rolling Stones. Au 2ème niveaux, ce serait les Kinks et les Who. Au 3ème, les Pretty Things, Them, Yardbirds, Small Faces etc. Intellectuellement parlant, j’aurais du mal à classer les garagistes, dans les groupes avant le 4ème niveau, même si certain titres pris séparément pourraient y figurer, comme le « Midnight To Six » des Pretty Things voir un « You Really Got Me » des Kinks.
Pour Christophe Brault, la frontière n’est pas si claire. Dans la liste des albums chroniqués, on retrouve un Kinks, un Who, un Pretty Thing, un Them, un Yardbirds et même le 1er Stones. Finalement le Link Wray, l’indien, pionnier du Rock & Roll et de la surf musique est un choix moins incongru, tant son influence fut grande chez les futurs garagistes. Quoi qu’il en soit, toute liste est forcement soumise à débat.
Les choix faits ici sont globalement les bons, on retrouve bien évidement la crème de la crème : le Count Five et son excellente pochette avec le groupe photographié comme s’il regardait un cercueil mis en terre, les furieux Sonics de Tacoma, les Monks, faux moines dada avec tonsures et robes de bures de rigueur, les Seeds, des illuminés menés par le givré Sky Saxon, dont nous avons déjà parlé ici. Je passe sur les Remains, un peu lisses et sur le 13th Floor Elevator de Roky Erikson croisé aux Transmusicales, pour m’arrêter sur Question Mark et ses Mysterians coupables du seul n°1 de la sélection, l’imparable « 96 Tears », oublié des compiles Rhino pour d’obscures raisons de droits. Le titre avec son orgue hypnotique et obsédant est surnagé par le chant tremblotant de Rudy Martinez et pour les paroles, je laisse aux mathématiciens le soins de vous en expliquer la teneur. On trouve aussi le 1er album de The Litter dont la reprise « Action Woman » est l’archétype du genre entre calme et fureur, le tout gavé de guitare fuzz. L’autre pépite de leur album est la reprise électrifiée du classique folk de Buffy Sainte Marie, Codeine. Dans les choix moins académiques, on croise les Texans de Zakary Thanks et leur Bad Girl joué à Mach 3. On a à peine le temps de respirer.
Chez les anglais, les choix sont plus étonnants. Hormis les ténors (Stones, Kinks, Who, etc.), on trouve les Animals, groupe que j’ai encore une fois du mal à classer dans le genre Garagiste. Par contre, les Downliners Sect, et leur Rhythm’n Blues sont un morceau de choix et ils seront l’influence majeure de Billy Childish l’immense activiste Garagiste anglais de la fin du XXème siècle. Avec les Birds, on touche une veine Mods avec un ancrage encore très Rhythm’n Blues mais plus acéré. Dans leur rang, un futur Stones, le petit Ron Wood qui fait encore ses classes. Avec The Action, c’est l’autre volant de la culture Mod avec une inspiration très prononcée pour la Soul sur laquelle la voix suave de Reg King fait des miracles. La reprise du « I’ll Keep Holding On » des Marvelettes est un modèle du genre. Au croisement du Rhythm’n Blues original, du psychédélisme et saupoudré de fureur Mods, existe un genre vénéré par les esthètes gavés d’amphétamine, le Freakbeat. Même si le genre n’a aucune existence légale, il permet de regrouper les groupes les plus furieux dans un même panier. On trouve ici, The Sorrows, The Eyes, Fleur De Lys, Creation, The Smoke et même les Birds sur certains titres. On ne va pas épiloguer sur le sujet, tout est bon et même très bon, c’est la quintessence du Rock anglais entre 65 et 67. Enfin, finissons sur le cas Troggs. Pour des raisons obscures, ce groupe qui jouaient dans les premières catégories, a été relégué au fil du temps dans les oubliettes de l’histoire. On peut considérer les Troggs comme des Seeds anglais. Ils étaient alors sur le devant de la scène, ils composaient de bons albums et ont même eu 2 n°1 dans les hits, dont l’insurpassable « Wild Thing ». Mais leur musique un peu trop sauvage, qui inspirera aussi bien le Hard Rock que les Punks, les poussera vers les groupes de zone B, puis de zone Z.
Bon, je ne vais pas tout dévoiler non plus, mais il y est aussi question du revival garagiste du début des années 80 (Barracudas, Cramps, Fleshtones, Pandoras, etc.), puis des années 2000 qui entérine le genre dans ceux qui comptent.
Si on fait l’impasse de la bande son, le livre se lit relativement vite, mais il prend une autre saveur lorsqu’on prend le temps de déguster chaque page en écoutant religieusement les titres proposés. L’ouvrage est plutôt à destination des novices, mais l’amateur trouvera aussi son compte en découvrant à coup sûr de nouvelles pistes pour étancher sa soif de cambouis.
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Christophe Brault donnait une conférence dans le cadre des Transmusicales 2016 et a été invité sur le plateau de l’émission “Ping-Pong” en compagnie du directeur artistique du festival Jean-Louis Brossard.
Écouter l’émission en podcast sur le site de France Culture
Grand spécialiste du genre, Christophe Brault comble les adeptes du rock en particulier du genre « Garage » avec la sortie chez Le Mot et le Reste d’une petite bible intitulée Rock Garage, fuzz, farfiza & distorsions. Rien que ça ! Pour ne fâcher personne, soyons-clair : le Garage qui nourrit l’histoire du rock depuis les années soixante, s’est sans cesse renouvelé et de nombreux groupes y ont parfois posé un ou deux pieds, ainsi, les Trahsmens, les Cramps, John Spencer Blues Explosion, le Velvet…. Mais le rock Garage, ce genre réputé sale et peu sophistiqué regorge d’une myriade de groupes, la plupart complètement inconnus pour le commun des mortels. De l’intemporel Louie Louie jusqu’à nos jours ou presque, le recueil de Christophe Brault, construit chronologiquement par albums phares, propose une très riche introduction historique de l’auteur comme divers classements d’albums et de groupes plus instructifs les uns que les autres. Un véritable inventaire, intelligemment mené et remarquablement documenté sur un genre musical qui n’a jamais cessé de se réinventer depuis sa création.
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Si le Rock est fait pour pousser la réalité un peu plus loin, pour exprimer l’inexprimable, pour pousser un cri de révolte devant notre condition d’humain, alors il est naturel d’user d’électricité en surcharge, d’amplis saturés, de sons distordus…
Ce style de performance musicale, c’est le ROCK GARAGE, fabriqué à l’arrache dans des conditions limites, sans respect pour la syntaxe, les tympans ou les règles habituelles d’enregistrement. Fuzz (saturation) est la règle.
Jailli naturellement des chambres, greniers et caves des parents d’adolescents têtus, repoussé vers les garages afin d’éviter trop de contamination, ce style s’est développé comme les mauvaises herbes… sans fin.
Le Rock Garage est la BASE de toute expression Rock’n’Roll. Ensuite, les starlettes du genre peuvent toujours rajouter des ingénieurs du son, des filtres, des cabines, des pistes ou des directeurs artistiques, le mal est fait.
Le livre de Christophe Brault nous donne la naissance en 1961 aux USA, nord-ouest, État de Washington, avec les premiers amateurs, fous de guitare comme Dick Dale (le tube de ce libano polonais est oriental et Rock !), The Chantays (repris par Johnny Thunders des New York Dolls 15 ans plus tard), ou encore l’imparable Louie Louie aux nombreux interprètes , et je dois citer le « 96 tears » de Question Mark (vers 1965) pour l’orgue Farfisa.
Mais à part ces planètes hors du temps, il y eut, en dehors des Américains uniques desperados, beaucoup d’Anglais, pas mal de Surfers, des semi-pros, des déchainés, tous se souvenant des merveilles de Bo Diddley, Chuck Berry ou Little Richard.
Car des Shadows aux Beatles, des Flamin Groovies au Velvet, tous ont flirté avec le GARAGE, comme la référence de base, l’ADN du Rock, comme on dit…
Je ne peux m’empêcher de citer quelques autres modèles du genre comme The Seeds, The Sonics, mais aussi MC5, Stooges, Pretty Things, The Kinks et The Who, Small Faces ou Cramps, bref tous ceux qui inventent des choses sans respect ni références, oubliés ou presque Rockabilly, Blues, Folk et Soul et qui créent par instinct des sons tortueux et inventifs, souvent sexys et violents, avec des envolées angéliques inattendues.
En tout cas cette sortie aux éditions Le Mot et le Reste ne peut que nous rendre modestes : 250 pages de titres, groupes, morceaux et explications, dont même les amateurs ne connaissent pas le quart des acteurs et intervenants.
Car le Rock Garage a plusieurs vie : début sixties, puis tout au long de la décennie, puis fin des années 70, puis pendant la New Wave… et refrappe encore dans les années 90 et 2000. Un éternel retour, comme tous les grands GENRES.
À la rigueur certains ont entendu parler des Count Five, à cause de « Psychotic Reaction » (1966), des Troggs grâce à « Wild Thing », ou de 13th Floor Elevator, à cause du psychédélisme…
Mais si je vous dis : The Sorrows, The Boots, The Eyes, The Creation, The Wheels, The Monks, rien que pour les années 60, ou Oblivions, Dirt Bombs, Love me Nots, Black Lips, pour les années 2000, vous resterez, comme moi, ébahi devant les relais permanents de ce style : pas moins de 100 groupes sont décrits avec labels, discographie et signes de reconnaissance !
Merci à Christophe Brault pour cette leçon de choses « Garage ».
Découvrez la chronique en musique de Jean Rouzaud sur le site de Nova